Bien Boire en Beaujolais 2018 (16/04/18)


 

Nouvelle édition de la BBB (la 7ème sous ce format) qui doit commencer à vous être familière si vous me lisez régulièrement. Et toujours un succès. Plus de 200 domaines présents sur 3 beaux sites du Beaujolais (Châteaux de Pizay, de Ravatys et de Corcelles), et environ 2000 professionnels qui font le déplacement. On voit bien que la région intéresse de plus en plus de monde.

Revers de la médaille, même si l’organisation est bien huilée, il devient difficile d’accéder à certains stands dans de bonnes conditions et il est carrément impossible de goûter tout ce qu’on aimerait goûter sur les 3 sites. On voit également apparaître des tensions chez les vignerons de la première heure, à l’origine de cette manifestation (La Beaujoloise a été créée en 2005 autour de Marcel Lapierre) avec l’arrivée des gros faiseurs de la région, des négociants qui font de tout dirons-nous pour rester poli et qui ne sont pas véritablement des artisans mais qui ont « réussi » à intégrer la manifestation. J’ai bien peur que la belle unité dont ont fait preuve tous les protagonistes de ce merveilleux salon vole en éclat à un moment ou à un autre… Affaire à suivre.

Du côté des dégustations, qui sont quand même ce qui nous intéresse le plus, 2015, 2016 et 2017 étaient évidemment les principaux millésimes présentés avec des tops et des flops comme on dit…

Je mettrai bien entendu l’accent sur les tops parce l’expérience montre qu’on ne peut pas jeter aux oubliettes des cuvées qui se présentent mal sur un salon et qu’il faudra regoûter pour un avoir un avis définitif.

 

2017

 

Du côté des 2017 (tous bruts de cuve), les Morgon du domaine Desvignes dominent l’assemblée avec une justesse confondante des jus sur les 3 cuvées emblématiques Javernières, Côte du Py et Les Impénitents. Délicieux ! Dommage que les rendements soient si faibles… (moins de 20 hl/ha de moyenne sur ces 3 cuvées)

A noter l’arrivée au domaine de 2 nouvelles cuvées. La première est issue de vignes du domaine sur le climat Roche Noire (pas tout à fait une nouveauté puisque déjà isolé une fois en 2005), je ne l’ai pas trouvé vraiment supérieur à La Voûte Saint-Vincent sur cette dégustation. La seconde est issue d’achats de raison sur Corcelette et est intéressante car plus légère et au fruit plus expressif, ce sera un vin à boire tôt et qui apportera beaucoup de plaisir.

 

Parmi les autres 2017 qui m’ont paru particulièrement intéressants, j’ai noté le Beaujolais-Villages La Sambinerie de Richard Rottiers (les Moulin étaient présentés sur 2016), un vin concentré et mûr avec une belle constitution, un achat intelligent pour qui se moque du nom du cru.

 

Egalement très appréciables les malheureusement rares Fleurie 2017 de Jean-Louis Dutraive qui étaient déjà étonnamment prêts, sans traces d’acétate, pourtant souvent présents dans ses vins à cette période. Des jus purs et pleins de fruit, légers bien sûr, qui ont fait son succès et sa réputation et que je suis heureux de retrouver à ce niveau après les épreuves climatiques subies par le domaine. Je suis impatient de les rentrer.

 

2016

 

Ils représentent le gros de la troupe. Avec une hétérogénéité qui ne se dément pas.

Mes préférés sur le salon étaient ceux de Thibault Liger-Belair, pourtant issus d’un millésime chaotique en raison de la grêle. Il faut croire que l’épisode de grêle précoce, n’a pas eu de grosses conséquences qualitatives ici car les matières sont d’une remarquable douceur, parfaitement équilibrées et sans aucune rusticité ni verdeur. Peut-être pas des vins à garder 15 ans mais un grand plaisir assuré dans les 7/8 ans. Mention spéciale au Champ de Cour, d’une élégance et d’une finesse superlatives. J’espère pouvoir les rentrer dans un avenir proche.

Belle gamme homogène au domaine de Fa, avec un Beaujolais encore un peu jeune mais qui va s’affirmer dans 1 an ou 2, un Fleurie d’école et un Saint-Amour qui domine les 2 autres par son harmonie et son délié parfaits. Comme déjà dit, le travail de fonds dans les vignes apporte déjà des résultats intéressants même si je suis sûr que le domaine fera encore mieux à l’avenir.

Chez Nicolas Chemarin, on note que le Beaujolais-Villages Vignes de Jeannot goûte mieux à ce stade que Le Rocher et confirme son excellent rapport Q/P.

Chez Romain Jambon, on est heureux de retrouver la cuvée Les Vieux Ceps en pleine forme « malgré » les 90 ans de la vigne, un vin plein et intense qui n’est pas sans rappeler le 2011.

Ailleurs, beaucoup de vins que j’ai déjà goûtés à maintes occasions dans les domaines, je ne reviendrai donc pas dessus mais je peux tout de même vous confirmer les grandes réussites du château Thivin et de Mee Godard sur ce millésime.

 

2015

 

Ils commencent à se faire rares !

Mais quand on les goûte, on voit le fossé qui les sépare des autres millésimes récents et leur parenté avec les 2009 est évidente.

A commencer par le superbe Fleurie Clos du Pavillon du domaine des Marrans, à la fois construit pour durer et déjà épanoui pour charmer, une des grandes bouteilles de beaujolais 2015 à ne pas manquer.

Il y a aussi le Fleurie La Dot du Clos de Mez qui lui est davantage construit qu’épanoui ! Mais quel fond, quelle puissance ! A attendre patiemment comme on le ferait pour un Moulin-à-vent Héritage d’Eric Janin par exemple auquel j’ose le comparer. Si on veut tremper ses lèvres dans un 2015 plus tôt, il y a aussi le Fleurie Mademoiselle M, cette nouvelle cuvée de Marie-Elodie Zighera remplira parfaitement cet office.

Et puis j’ai goûté avec gourmandise les éclatants Moulin-à-Vent 2015 du domaine Labruyère qui sont franchement sensationnels, dès la cuvée Cœur de Terroirs qui est déjà charmeuse et sensuelle, irrésistible… Les cuvées Champ de Cour et Le Carquelin (et en particulier ce dernier) ajoutent un élevage sous bois qui sans être prégnant est porteur d’épices et de complexité invitant à -un peu- plus de patience. Quant au Clos, il est époustouflant de justesse à tous les niveaux et son élevage millimétré est à souligner. C’est vraiment une remarquable gamme que je vous invite à découvrir.

 

Plus vieux…

 

Comme d’habitude, les quelques millésimes antérieurs présentés ont montré tout le potentiel d’amélioration et de garde des Beaujolais que le temps magnifie autant que les Bourgogne.

Aucune fausse note parmi les Côte-de-Brouilly Godefroy 2009 du château Thivin, Fleurie La Dot 2006 du Clos de Mez, Côte-de-Brouilly 2009 de Julien Duport, Fleurie Cuvée Spéciale 2000 & 2005 de Cédric Chignard, Fleurie 2011 du domaine des Marrans, Fleurie La Griffe du Marquis 2010 d’Alain Coudert, Morgon Côte du Py 2011 du domaine Desvignes, Moulin-à-Vent La Roche 1999 du Château des Jacques et quelques autres que j’ai oublié…

 

A l’année prochaine !