Dégustation des 2018 de Daniel Bouland (07/02/19)


 

C’est un Daniel Bouland souriant qui m’accueille en cette fraîche journée de Février 2019. Ravi de ces 2018, tant par leur qualité que par la quantité produite (il a « fait le plein » avec 50 hl/ha en moyenne), son moral est au beau fixe. Il a pu isoler tous ses terroirs de Morgon en vinification et, s’il n’a pas encore tout à fait arbitré, il est probable que 7 ou 8 cuvées différentes de Morgon voient le jour !

J’avais quitté Daniel au 3ème jour des vendanges le 06/09/18, où il m’avait confié son inquiétude vis-à-vis des vinifications, en raison d’acidités assez faibles. Il me confirme que quelques cuves ont fermenté longtemps avant de terminer leurs sucres (jusqu’à 30 jours après pressurage), mais que tout s’est bien terminé pour lui, sans aucune apparition de bretts notamment. Les degrés sont compris entre 13°2 et 14°2, ils sont plus contenus qu’en 2009 et 2015 de manière générale. Les acidités sont un petit peu plus élevées mais restent assez faibles.

Nous goutons toutes les cuves séparément, sur des échantillons préparés la veille pour les mettre à bonne température. Pour info, le numéro des cuves vient de l’ordre dans lequel les vendanges ont été conduites. Les vins ont reçu 30 mg/l de SO2 après malo et rien depuis.

 

·         Chiroubles Chatenay 2018 (cuve n°11, la dernière ramassée) : Cuve en fibre de verre. 14°2

Couleur intense et profonde, avec beaucoup d’éclat. On retrouve cet éclat dans les saveurs malgré une légère réduction. Le gaz est présent mais ne gêne pas. L’aromatique mêle fruits rouges et noirs, elle s’exprime parfaitement. Pas de chaleur ressentie, et au contraire un bel équilibre gourmand. Très bon (comme d’habitude…)

 

·         Côte-de-Brouilly Cuvée Mélanie 2018 (cuve n°1, la première ramassée donc) : Cuve inox. 13°7

Daniel s’était fait « avoir » en 2017 sur ce terroir solaire où l’été 2017, chaud et très sec, avait accéléré la maturité des raisins. Le vin titrait près de 15° et manquait de fraîcheur ; cette année il a décidé de commencer les vendanges par cette parcelle pour avoir un vin plus frais.

Objectif atteint pour ce vin bien frais aux notes de réglisse et aux accents minéraux comme toujours affirmés. Très expressif, avec ce toucher de bouche caractéristique de la Côte, où le grain de tanin est fin. C’est très bon et son équilibre le portera loin.  

 

·         Morgon Pré Jourdan 2018 (cuve n°5) : Foudre.

Il s’agit d’une parcelle de 35 ares qu’il possède depuis longtemps mais qu’il ne commercialisait pas en France. C’est la seule parcelle de Morgon qui n’est pas sur Corcelette mais sur Douby. Les vignes de 60 ans sont voisines de celles du domaine Desvignes (La Voûte Saint-Vincent).

On entre en douceur dans le cercle des Morgon avec ce vin bien fruité et ouvert  mais qui montre les limites de son terroir en offrant une bouche de demi-corps, et en finissant très court. Les tanins discrets en font un bon canon que l’on appréciera idéalement dans les 3 premières années.

 

·         Morgon Bellevue « Sables » 2018 (cuve n°2) : Cuve béton avec revêtement époxy (65 hl). Terroir de sables, porte-greffe Viala.

Le premier des deux Bellevue affiche un fruit plus mur qu’en 2017 malgré une récolte précoce. Daniel me confirme la maturité toujours avancée de cette parcelle. En bouche, le vin est minéral avec une légère sensation de sécheresse et un fruit actuellement en retrait. C’est bon mais je trouve qu’il manque d’éclat et de moelleux pour l’instant. Et les tanins marquent un peu.

 

·         Morgon Bellevue « Cailloux » 2018 (cuves n°7 et n°8) : Cuve béton avec revêtement époxy (65 hl) + petite cuve inox à plafond mobile. Terroir de cailloux, porte-greffe 420A.

Je préfère immédiatement la seconde version de Bellevue (les vins sont goutés en parallèle). Si les notes de graphite sont encore bien présentes, voire peut-être même plus appuyées, elles se mêlent de fruits rouges dans une bouche alliant dynamisme et soyeux. Les tanins sont plus denses mais aussi plus ronds. Très bon vin à l’équilibre irréprochable.

 

·         Morgon Corcelette 2018 (cuve n°6) : Foudre. Assemblage de plusieurs vignes d’une moyenne d’âge de près de 60 ans (donc pas encore vieilles…)

Cette cuvée est très complète, avec une belle concentration et un fruit bien ouvert. Moins marqué par la minéralité et davantage par les fruits rouges, on ne pourra éventuellement lui reprocher qu’une chose, c’est un léger manque de personnalité dans la série. Mais c’est très bon.

 

·         Morgon Corcelette n°4 2018 (cuve n°4 donc) : Foudre de 50 hl. Plusieurs parcelles de vieilles vignes. Terroir de cailloux. Porte-greffe 420A.

       & Morgon Corcelette n°3 2018 (cuve n°3…) : Foudre de 50 hl. Vignes plantées en 1927. Terroir de sables. Porte-greffe 420A.

Les deux cuves de Corcelette Vieilles Vignes sont goutées en parallèle. J’alterne les verres et je cherche les différences mais l’exercice est difficile tant les vins sont proches dans leur expression. Ils affichent tous les deux un profil minéral et surtout floral très élégant, qui doit être caractéristique des vieilles vignes du secteur car je retrouve ce côté floral tous les ans. La bouche profonde, est empreinte de finesse et offre des tanins ciselés et précis. La fin de bouche s’étire longtemps avec une belle tension. Deux grands vins très élégants, précis, superbes pour longtemps.

 

·         Morgon Les Delys n°9 2018 (cuve n°9) : Cuve inox de 50 hl. Vieille vigne de 1926. 14°2

       & Morgon Les Delys n°10 2018 (cuve n°10) : Cuve béton de 65 hl. Vignes un peu plus jeunes (70 ans quand même). 14°

A nouveau goutées en parallèle, la cuve n°9 apparaît plus compacte et plus fermée, ce qui peut être dû à la différence de contenant. Elle est un peu gazeuse également à ce stade. Les deux vins offrent une belle complexité minéral/florale/fruitée et beaucoup de fonds. Les tanins sont denses, bien présents mais surtout très bien travaillés de manière qu’ils ne marquent pas la bouche exagérément. Ils n’ont peut-être pas autant de finesse que les Corcelette Vielles Vignes, mais ils offrent encore plus de profondeur et de moelleux. L’équilibre est à nouveau irréprochable. Encore deux grands vins donc ! A ce stade, je préfère le n°10 mais il faudra regouter à la mise pour mieux comparer.

 

Voilà, encore une bien belle dégustation chez Daniel qui enchaîne les beaux millésimes avec une régularité de métronome, ce qui est la marque des grands vignerons me semble-t-il. Chapeau bas Monsieur Bouland, et maintenant on va se casser la tête pour savoir quelles cuvées choisir !